Interview de Catherine, entrepreneur et créatrice de Gwenacook.
Bonjour Catherine !
Merci de nous avoir contacté et de bien vouloir prendre du temps pour nous présenter Gwenacook. Alors, racontez-nous Gwenacook, c’est quoi ?
GWEN HA DU ET COOK : cuisiner autour des produits bretons. L’idée est d’encourager et de faciliter la cuisine des produits de notre région en réunissant en un kit prêt-a-cuisiner la totalité des ingrédients nécessaires pour réaliser une recette ! Une manière pratique, facile et ludique de découvrir, tester et goûter les produits d’ici alors qu’on ne sait pas toujours quoi faire avec, ni le mettre en valeur faute d’avoir les ingrédients qui vont bien pour en faire un plat sympa. Par exemple ? Le choux fleur, qui est un légume emblématique du Finistère, ne se mange pas qu’en gratin béchamel…
En ayant tout sous la main à la bonne dose, avec la recette juste a suivre, il n’y a plus aucune raison de ne pas encourager le talent de nos producteurs en consommant de préférence le fruit de leur travail !
Qu’est ce qui vous a amené à penser et à créer Gwenacook ?
Gwenacook est en fait, le résultat de mes expériences…
… L’expérience de piètre cuisinière en manque d’inspiration et en manque de savoir faire. Du coup, on va toujours au plus pratique, à ce qu’on connait. On veut bien acheter local mais cela demande un effort et du temps d’aller à droite chercher son panier de légumes, puis à gauche sa viande, puis sur marmiton chercher comment conjuguer tout cela… et dommage, ce soir j’ai yoga ! Il faut être convaincu pour le faire et plus encore pour le faire dans la durée car ce n’est pas simple de faire durer les bonnes intentions, surtout quand le panier de légumes prévu contient du rutabaga et que le rutabaga, comment dire… !? En fait, je ne sais pas trop quoi en faire surtout !
… L’expérience de consommatrice bien formatée à toujours acheter moins cher que moins cher qui fait qu’on arrive à nous proposer du « minerai » à la place de la viande ! Et parce que c’est moins cher au kilo, c’est mieux d’en prendre des tonnes (En plus, c’est écrit en grand : « on fait une affaire !! ») même si on sait bien que cela va finir, comme tout ce qui n’a pas de valeur, à la poubelle ! Au moins on a fait une affaire !… C’était en promo ! 😉
… L’expérience du monde agricole qui propose des produits de qualité qui partent à bas coût ailleurs et de voir sur nos étals des produits qui viennent d’ailleurs à prix plus bas encore ! Des kilomètres qui dévaluent ?
… L’expérience de découvrir chez ces mêmes producteurs, des productions qui donnent du travail à des familles (mes voisins?), alors que je n’en ai jamais acheté, trop habituée à consommer des produits venus d’ailleurs… et s’étonner ensuite que les producteurs ne s’en sortent pas, perdent tout, y compris parfois leur vie par désespoir.
… et enfin parce que j’ai travaillé avec eux, entre autre à genoux dans les champs en hiver alors que les voitures, elles, ont des parkings couverts. J’ai expérimenté physiquement que ce travail méritait plus que le 6 centimes payés par kilo d’échalote.
Concernant les produits proposés, tous, à 100%, proviennent de producteurs locaux ?
Non, bien sûr que non ! En bretagne, on n’a pas tout !… Même si on a beaucoup et que je suis loin encore d’avoir découvert tous les producteurs locaux.
Gwenacook, c’est avant tout de cuisiner autour des produits bretons, donc si le chef propose de mettre en valeur le choux-fleur avec du pamplemousse cela ne me gêne pas : il valorise dans cette association le produit local (l’essentiel, c’est d’inviter à consommer le produit qu’on aurait un peu tendance à bouder ou qu’on n’ose pas acheter parce que on ne sait pas vraiment le cuisiner alors qu’il fait vivre nos voisins, nos cousins !) et aussi, d’un autre coté, il y a surement un petit producteur à l’autre bout du monde qui y a mis tout son cœur. Pareil pour les épices, le riz, etc., qui sont super pour agrémenter un poisson breton!
L’objectif de Gwenacook est de rendre un produit d’ici, qu’on ne regarde pas forcement, un peu plus sexy ! Je pense au chou, aux épinards, à la rutabaga, la capucine, la poire de terre, etc. Il faut admettre que d’emblée, ils font moins rêver qu’un burger-frites-ketchup ! Pourtant, une fois qu’on les a goûté autrement que dans nos souvenirs de cantine, on n’hésite plus à le choisir sur les étals du marché… et puis tous ceux qui travaillent ici et participent a notre qualité de vie méritent qu’on regarde leurs production, qu’ils travaillent en extensifs, en bio, en Bleu Blanc Coeur ou non. Il y a surtout des femmes et des hommes engagés à donner le meilleur d’eux. Je les ai rencontré.
Vous parlez d’économie réalisée grâce à Gwenacook. Vous pouvez nous en dire plus sur ce point ?
Oui, les économies sont réelles pour le consommateur qui y gagne en qualité. Avant comme tout le monde j’allais chez Netto, Lidl ou Leclerc et avec 50€ je n’avais rien dans mon caddie. Chez Gwenacook, avec 50€ / semaine, vous avez 7 à 8 plats complets avec de la vraie viande, du vrai poisson, des vrais légumes, sans conservateur ni additif ni sucre ajouté
L’économie, c’est aussi tout ce que vous ne jetterez plus car il n’y a plus de gaspillage, ni besoin de payer pour recycler.
L’économie de temps aussi, est évidente : il suffit juste de cliquer sur le résultat souhaité ! Même plus de liste de courses a établir, ni l’inventaire des placards, ni passer une heure et demi en moyenne en grandes surfaces… surtout quand 15 minutes pour à se faire à manger est jugé déjà assez long !
L’économie, c’est d’acheter utile : pourquoi acheter un litre quand on a besoin que d’une cuillère à soupe ?
L’économie, c’est aussi de gagner en santé, en cuisinant à la maison de vrais produits et en maîtrisant ce qui est mis dans son assiette.
L’économie, c’est de ne plus faire de stock qui fait la trésorerie de celui qui vous l’a vendu, mais pas la vôtre ! Surtout qu’on finira de toute façon par l’oublier pour ensuite le jeter.
L’économie, c’est aussi de faire vivre son voisin car c’est aussi en retour qui nous fait vivre. Si lui ne s’en sort pas, comment t’en sortir, toi, demain ? A chaque fois qu’un producteur tombe, c’est une chance de moins pour toi de tenir.
Avez-vous quelques exemples de plats et leurs prix à nous donner ?
Les prix sont calculés pour être accessibles au plus grand nombre et dépendent des ingrédients fournis : un plat avec des saint jacques coûtera plus cher qu’un plat végétarien. Comme le but n’est pas de négocier à la baisse le travail de celui qui l’a produit, j’intègre cela dans mon prix qui va de 5€ à 9€, voire jusqu’à 12€ pour des plats très spécifiques.
Nous proposons chaque semaine 11 plats différents à cuisiner à la maison. On essaie de proposer pour tous les goûts : des plats végétariens, des plats à base de volaille, de bœuf, de porc, autour des algues, de gibiers, des légumes méconnus, des plats de tous les jours et des plats plus pour les occasions, des plats plaisir et des plats minceurs… et parfois même des desserts !
Et chaque semaine, nous changeons les plats que nous proposons ! Sur marmiton, j’ai calculé qu’on peut manger un plat différent chaque jour pendant plus de 80 ans ! Aujourd’hui, nous avons déjà réalisé plus de 330 recettes : on peut donc déjà vous proposer de manger de manière ultra-varié pendant presque 1 an (D’accord, il ne nous reste plus que 79 ans de travail !)
Merci beaucoup Catherine pour toutes ces informations !
Une dernière chose : vous avez lancé une campagne de crowfounding sur Kengo. Votre objectif est de collecter 4000€ : qu’allez vous en faire ?
Comme toute proposition qui offre une autre façon de consommer en achetant plus juste, mais qui demande de changer un peu nos habitudes de GMS, cela mets du temps à s’installer. Comme je n’ai pas le budget d’une grande entreprise pour faire connaitre le concept du kit prêt-a-cuisiner, la campagne de crowdfounding est une façon pour moi de faire découvrir aux bretons que cette offre, qui existe ailleurs (bien que pas toujours orientée locavore), est aussi disponible pour eux et qu’il faut qu’ils s’en emparent. Parce qu’elle est un facilitateur pour reprendre la main !
Si la campagne attend son objectif, cela me permettra de continuer cette aventure. La communication coûte cher, ainsi que l’optimisation du site Internet, ou le fait de décliner nos recettes pour les problématiques allergènes, ou encore le temps consacré à découvrir et tester de nouveaux produits et producteurs, la mise au point et les test des recettes, etc. … et enfin pour continuer à mettre un coup de projecteur sur la richesse et la diversité de nos producteur !
Cette mise en avant de Gwenacook est aussi là pour les consommateurs, afin de leurs faciliter la démarche d’être locavore en leur donnant toutes les clefs : quand on a goûté à la qualité des produits de nos voisins producteurs et qu’on a appris à les utiliser, on n’a plus qu’une envie c’est d’y retourner ! Y compris, y retourner seul.
Un concept juste génial, des produits frais délicieux et locaux en plus. On retentera l’expérience avec grand plaisir!