La situation actuelle est un énorme bouleversement.
La brutalité des événements fait qu’on ne s’y attendait pas, du moins pas sous cette forme-là. On avait bien imaginé quelques scénarios de changements radicaux, mais se retrouver confinés, sans avoir le droit de se voir ni de sortir, c’est la grande surprise ! Et elle n’est pas bonne pour tout le monde. Pour beaucoup, nous n’étions pas prêts.
Car forcément, une telle situation a des répercussions économiques radicales : beaucoup de gens ne peuvent plus aller travailler. La plupart des employés touchent 70% de leur salaire, voire moins, et nombre d’indépendants vont rester sans le sous pendant la période que durera le confinement. Sans compter ceux qui ont été licenciés du fait des bouleversements.
On se recentre sur l’essentiel.
Nous voilà donc recentrés sur nous-mêmes, sur le noyau familial (pour ceux qui en ont un), sur le chez-soi (pour ceux qui en ont un, également) et sur l’essentiel. Et qu’est-ce que l’essentiel? L’accès à l’eau, la sécurité physique, l’alimentation – et l’amour, bien sûr. Par la force des choses, l’alimentation redevient un des premiers postes de dépenses et une des premières préoccupations. Car il faut bien continuer à manger, même si nous avons moins d’argent. Comme le ravitaillement est moins simple qu’à l’accoutumée, n’est-il pas de bon ton de réduire le gaspillage alimentaire et de cuisiner un peu plus?
Justement, depuis une quinzaine de jours, nous observons un phénomène plutôt réjouissant.
Les producteurs locaux se voient sollicités comme jamais. La vente directe et le circuit-court explosent. Il faut dire que les supermarchés sont un peu moins sexy en ce moment – l’ont-ils déjà été… Ce n’est pas forcément là où on a envie d’être, dans cette période où on nous demande de ne croiser personne. D’autant plus qu’on ne sait pas combien de mains ont manipulé cet article avant nous. Que ce soit avant d’arriver jusqu’aux étals, ou depuis qu’il y est. Et d’où vient ce produit, d’ailleurs? Et si jamais il fallait stopper net les importations, qu’aurait-on à se mettre sous la dent? Les produits arriveraient-ils encore jusqu’à nous? Ce sont ces questions flippantes qu’on ne se pose justement pas avec les producteurs locaux. Ils sont là, à proximité. On peut facilement trouver leur exploitation, on les voit sur les marchés, parfois même on les connait personnellement. On sait qu’il n’arrêteront pas de cultiver, d’élever, de fabriquer. On sait que leurs produits sont bons, frais, locaux. Et lorsqu’on les achète, ces produits, on finance la production alimentaire sur notre territoire, qu’on en ait conscience ou non.
D’autant plus qu’acheter des produits bruts qui viennent d’ici coûte moins cher que d’acheter des produits transformés qui viennent de loin.
Tant en coûts directs qu’indirects. Et puisqu’en ce moment les produits ne viennent plus jusqu’à nous, un certains nombre de marchés ayant été interdits, nous allons en masse les chercher là où ils sont : chez les producteurs.
Christian Hascoët, du GAEC du Stang à Guengat, a vu le volume de ses ventes tripler en quelques semaines. Il précise « je pense que c’est le début d’un changement de fond. Il faut juste que les producteurs se réorganisent avec par exemple la création d’agri-drives par canton! ».
Dans le Cap-Sizun, où j’habite, deux associations permettent de commander en ligne les produits locaux : A vos Papilles et Paniers du Cap. Eux aussi font face à une augmentation nette de l’activité. A titre d’exemple, l’association Paniers du Cap a doublé ses ventes, et A vos papilles a accueilli plus de 25 nouveaux adhérents la semaine dernière, contre les 3 ou 4 inscriptions hebdomadaires habituelles. Et cela s’en ressent sur le volume de commandes : elles sont passés d’environ 35 par semaine à plus de 100 pour la semaine passée ! Et les nouveaux adhérents continuent d’affluer.
Nous nous réjouissons pour eux, car les producteurs font de manière générale un travail admirable.
D’ailleurs, l’augmentation de leurs ventes révèle clairement qu’en situation problématique, nous nous replions sur le local. Car l’échelle locale est plus palpable, moins anonyme, on y voit plus clair, elle est plus fiable. Et énorme avantage : il est beaucoup plus facile de se réorganiser rapidement et de s’adapter aux nouvelles contraintes à un niveau local. C’est ce que nous montre clairement cette crise. Le local est assez solide et résilient pour traverser l’épreuve, même si cela demande beaucoup d’énergie aux producteurs pour se réorganiser.
Mais qu’en est-il de la suite ?
Allons-nous délaisser les productions locales après la crise ? Allons-nous dire merci et kenavo aux producteurs qui nous auront tant dépannés ? Ou souhaitons-nous intensifier cette coopération qui fonctionne bien ? L’ancrer dans la durée ? Ne serait-ce pas le moment idéal pour intensifier un changement de modèle ? Arrêter de dépendre totalement d’ailleurs et développer les potentiels d’ici. Et arrêter de compter sur les politiques pour nous montrer la voie.
Jeanne Tournereau, productrice et membre d’À Vos Papilles, espère que ces événements nous feront prendre réellement conscience du rôle que peuvent jouer les circuits courts pour nous nourrir au quotidien, et que ces nouvelles habitudes de consommation perdureront après la crise. « La balle est dans le camp des consommateurs », conclut-elle.
Christian Hascoët aussi pense à la suite : « en fait il va surtout manquer des agriculteurs, d’où l’urgence de favoriser l’installation des jeunes, et la relance d’outils de transformation comme l’abattoir de Pont-Croix. »
Alors, on s’y met?
Bonsoir, vous êtes dans quelle région svp?
Cordialement et bonne continuation!
Mireille Soulignac
Qui donc ? 😀
Bonjour, je suis souvent étonné que les produits locaux, qui n’ont donc pas eu le coût du transport lointain, ni d intermédiaires, soient bien plus cher qu’en magasin. C est dommage, je suis pourtant favorable à consommer local mais le porte monnaie est restreint. Merci d’être présent en ce moment difficile, j espère juste trouver chez vous producteurs locaux, de quoi satisfaire notre modeste budget, ma femme et moi. Bon courage à vous. Nous espérons aussi être livrés puisque nous ne pouvons nous déplacer à plus de 1km, c est interdit.
Bonjour Antoine,
Et bien, il s’avère que ça n’est pas plus cher en local et en circuit court… mais au contraire, souvent moins cher !
Voici deux cas pratiques :
– https://www.mangeons-local.bzh/est-ce-que-manger-local-coute-plus-cher/
– https://www.mangeons-local.bzh/comparatif-de-prix-supermarche-vs-circuit-court-cher/