Chouchen ou Chouchenn ?
Tout dépend si tu l’écris en Français ou en Breton. En Bretagne, on aime doubler le n !
Allez, je t’invite à partir à la découverte de ce breuvage béni des dieux (enfin, des bretons… mais c’est presque pareil 😜)
- Qu’est-ce que le chouchen ?
- Quelle est la composition du chouchen ?
- Quelle est la signification du mot chouchen en Breton ?
- Les effets du chouchen : mythe ou réalité ?
- Quel goût a le chouchen ?
- Cocktails au chouchen.
- Où acheter du chouchen ?
- Interview de producteur de chouchen.
Qu’est-ce que le Chouchen ?
Le Chouchen est tout simplement le nom breton de l’hydromel, une boisson ancienne, légèrement alcoolisée, issue de la fermentation de miel et d’eau.
Enfin, c’est un poil plus compliqué. 😅
Il existe plusieurs « recettes » en fonction des époques et du lieu. Mais généralement, il est toujours question d’eau, de miel et parfois de jus de pomme.
Quelle est la composition du Chouchen ?
Comme précisé, il faut peu d’ingrédients : du miel, des pommes, de l’eau douce, beaucoup de fermentation et parfois des levures.
Enfin, pour les pommes, ça dépend des recettes. 😉
Parfois il n’y en a pas, parfois il y en a.
Et s’il y en a, ça peut être du jus de pomme, du moût de pomme ou du cidre.
Et puis côté miel, il existe là aussi des variantes : toutes fleurs, blé noir, bruyère, etc.
Le plus souvent, on utilise les miels de printemps (pommier, pissenlit) et d’été (framboisier, trèfle, fleurs sauvages, châtaignier). Auparavant, et encore de temps en temps, on utilise le miel de sarrasin (sombre et incroyablement fort en goût).
En bref, l’eau est un des substrats de base mais des variantes (nombreuses) existent pour obtenir des hydromels aux saveurs différentes.
La signification du mot Chouchen en Breton
Les gens aiment les légendes, surtout quand il s’agit de la Bretagne…
Du coup, j’adorerai te raconter l’histoire du Chevalier Chouchenec dans la forêt de Brocéliande, qui but une boisson emmiellée directement du Saint Graal, et qu’il l’appela « Chouchen »…
Mais non.
Chouchen est une marque déposée dans les années 20′ et, à priori, n’a pas réellement d’historique en breton.
Et du coup, on appelait ça comment, avant les années 1920 ?
Ça dépend de l’époque et du coin de Bretagne… mais également, ça dépend de la recette.
Voici quelques noms de vins de miel breton, plus ou moins assimilés au chouchen d’aujourd’hui :
- Mez : vieux terme breton pour un « breuvage fait d’eau et de miel » (hé ! ça te rappelle pas quelque chose ? 😉).
- Dourvel : signifie « eau de miel » en breton (mot à mot).
- Chufere (ou Chupere… ou Chipere… ou Chifere 😅) : quasiment du chouchen, mais il est aussi question de cidre en lieu et place de l’eau. Se traduit par « jus féroce » en breton.
- Souchen : on se rapproche !
Perdu ?
Bon… Reprenons tout ça de zéro, et promis, tu vas y voir plus clair (peut-être…)
Un peu d’histoire…
On retrouve des traces de consommation de l’hydromel à l’époque du néolithique (10 000 ans av JC) avec son apogée qui coïncide avec celle de la civilisation grecque.
(Ah bah oui, je t’ai dit : on reprend tout à zéro ! 😉)
Plus tard sur notre frise historique, les vignobles se développent avec les Romains et le vin supplante l’hydromel.
Pourtant, à cette époque, les Romains lui donnaient des vertus aphrodisiaques et les Gaulois célébraient sa force et sa gaieté.
Jusqu’au XVIe siècle, les pays nordiques font de la résistance (comme papy dans le film de Jean-Marie Poiré) car la vigne est rare… Pour finalement laisser progressivement la place d’honneur à la bière !
Certains producteurs continuent tout de même à faire la forte tête en perpétuant la tradition millénaire.
Tant mieux !
Car cette boisson alcoolisée est tout de même la plus naturelle au monde. (objectivement parlant, bien sûr)
Puis, « long story short », on arrive en 1895, où on retrouve le terme « Souchen », dans le journal d’Union agricole et maritime.
C’est dans un article écrit par un certain négociant rospordinois (de la commune de Rosporden donc, près de Quimper), dénommé « Le Moal ». Il présente sa liqueur comme un remède contre la grippe.
Est-ce réellement Le Moal qui l’a inventé ? Nul ne le sait !
En tout cas, Joseph Postic, négociant aussi à Rosporden et futur maire de la commune, a été plus malin, et a déposé officiellement la marque « Chouchen » en 1920.
Ensuite, la boisson a été plus moins appréciée et consommée, jusqu’à redevenir populaire avec le renouveau des fest-noz dans les années 70…
Euh… qu’est-ce que c’est le Chufere et le Chamillard, encore ?
C’est moi, où tu suis qu’à moitié mon histoire ? 😅
Bon, tu connais le breton… il a vu l’hydromel et il a vu la bouteille de cidre à côté.
Forcément, il s’est dit : « il y a un truc à jouer, gast ! ».
Le cidre, qui est un alcool à base de pomme, connaît déjà une première fermentation mais reste peu alcoolisé.
En relançant le processus avec du miel, tu obtiens donc un alcool explosif : le Chufere (ou chug ferv en breton, qui signifie « jus féroce »). Féroce ? Que nenni ! À peine 8-9° !
Et le Chamillard ? C’est un Chouchen de Haute Bretagne et plus particulièrement dans le pays Gallo, pour lui donner une appartenance géographique.
Les aromatisés…
Je ne vais pas compliquer notre histoire plus que ça, mais sache qu’il existe également des hydromels aromatisés.
Assez peu communs en Bretagne, on en trouve pas mal dans les pays anglo-saxons (ou le vin de miel, ou « mead » est très apprécié).
Par exemple, il y a le meddyglyn (meddyg pour guérison et llyn pour liqueur), mot gaélique qui désigne les hydromels aromatisés avec du thé, de la vanille, du gingembre, de la coriandre, de la cannelle…
Les effets du Chouchen : mythe ou réalité ?
Ah ! Toi qui voulais du légendaire… en voila une histoire sympa.
Gamin, on m’a toujours dit qu’à trop picoler de chouchen (surtout artisanal), on risquait de tomber en arrière. Et d’ailleurs, mon père se souvient d’avoir vu pas mal de ces amis en « mode tortue » les soirs de pleine lune. 😅
Mais ça, c’était avant !
A l’époque, on n’hésitait pas à mettre le rayon de miel écrasé avec les abeilles (et donc leur venin) dans les bouteilles. Or, le venin avait la particularité d’agir sur le cervelet, en partie responsable de l’équilibre.
Et badadam…
Et du coup, ça a quel goût le chouchen ?
Bah… un goût de miel ! 😅🍯
… et puis de pommes.
Mais bon, le plus simple, c’est encore que tu goûtes.
Le Chouchen dans la gastronomie
Tout comme le vin, les producteurs travaillent le Chouchen pour en sortir différents crus : liquoreux, moelleux ou sec.
Tout comme le vin, tu peux le laisser vieillir au moins un an, voire plus…
Tu dégusteras le Chouchen plutôt frais, en apéritif, en évitant les glaçons pour ne pas dénaturer le goût du miel.
Le Chouchen n’est pas un alcool très fort (13-14°) et il sera apprécié aussi en entrée sur un foie gras ou des fruits de mer. Il sera parfait avec du gibier, des poissons ou un melon mais aussi avec un dessert ou des crêpes.
Enfin, tu peux également le consommer chaud. En hiver, avec un réconfortant kouign amann, c’est absolument incroyable.
Voici d’ailleurs deux idées de cocktails avec du Chouchen :
Le Kir Celtique
Pour varier du kir traditionnel (vin blanc, crème de fruit) ou du kir breton (cidre, crème de fruit) pourquoi ne pas goûter au kir celtique ?
Dans un verre, verse un peu de crème de cassis de préférence.
Ajoute un fond de Chouchen et tu complètes par du cidre bien frais. Breton, le cidre… évidemment.
le grog celtique (oui, on aime le mot « celtique »)
Autrefois, dans les Charentes, certains médecins préconisaient un grog chaud avec du cognac et une aspirine pour l’état grippal.
En hiver, le grog breton au Chouchen se boit aussi sans être malade.
Verse de l’eau chaude, un bâton de cannelle (ou à défaut, de la poudre), un demi-citron pressé, du miel et bien entendu du Chouchen !
Yec’hed mad (à la tienne !).
Où acheter du Chouchen ?
Ah ! Je t’ai convaincu ? 😜
A la bonne heure.
Pour acheter un bon chouchen, il te faut te rendre dans une hydromellerie bretonne artisanale… et ça tombe bien, car j’en ai une à te présenter : Les Chouchenn d’Armor.
Interview – Producteur de chouchen
Bonjour Jean-Marie,
Tu tiens une hydromellerie, c’est à dire que tu produis des Chouchenn !
Mais… dis-moi.. Qu’est-ce que le Chouchenn ?
Bonjour !
Le Chouchenn, c’est une boisson issue de la fermentation de miel et d’eau. En fait il s’agit du nom breton pour désigner l’hydromel.
Apparu en 1895 sous la forme « souchen », ce nom est déposé en 1920 par le maire de Rosporden, Joseph POSTIC. Au départ présenté comme un remède à certains maux (chasse grippe), il fut ensuite décrié pour ses méfaits jusqu’à devenir une boisson identitaire et symbolique de la Bretagne avec le renouveau musical et culturel qui accompagne l’essor des fest-noz dans les années 1970.
Aujourd’hui, délaissé par les bretons qui le méconnaisse, le chouchenn trouve une grande partie de sa clientèle chez les touristes qui sont en général agréablement surpris par la dégustation et qui en achète souvent d’une année sur l’autre.
Le Chouchenn n’est pas un alcool fort (13°), on le surnomme généralement « vin de miel »… et toute personne aimant déguster des vins « liquoreux » à l’apéritif, en entrée ou au dessert devrait l’apprécier mais si son goût est vraiment typique de par le miel, seul ingrédient, près de 500g par litres.
Perso, je suis Breton et grand fan de Chouchenn ! 🤤 Et du coup, tu nous parles de ton hydromellerie ?
Créée par mon père, la société CHOUCHENN D’ARMOR existe depuis 1996, je l’ai reprise en 2019, avec pour ambition de faire perdurer son savoir faire et la belle relation de confiance tissée avec ses clients.
Je suis heureux de pouvoir proposer maintenant du chouchenn BIO dans notre gamme.
A goûter ! Tu transformes du miel en nectar à boire… Comment ?
J’utilise du miel de bouche (non industriel) pour la fabrication de mon chouchenn.
Le processus est totalement naturel avec simplement un ensemencement par une souche de levures de vinification.
Après une période de fermentation de 3 à 4 semaine dans des cuves en inox avec contrôle quotidien du bon déroulement.
Le chouchenn passe alors en cave en cuves dites « garde vin » afin de poursuivre sa maturation jusqu’à ce qu’il soit jugé bon pour la dégustation.
Il est alors sous-tiré et filtré afin d’obtenir de la limpidité et du brillant.
Je n’utilise aucun adjuvant type conservateur, colorant, stabilisateur, sulfite… et chaque lot est traçable.
Ce produit est comparable au vin, se bonifie par le vieillissement et n’a pas de date de péremption.
Je produis du chouchenn conventionnel en bouteilles 75cl, 50cl (bouteilles grès cachetée de cire) et 37,5cl. Du chouchenn BIO en bouteilles 50cl et nous proposons du vinaigre de miel en bouteilles 37,5cl élaboré par un vinaigrier à partir de notre chouchenn.
Merci pour toutes ces infos. Envie de rajouter quelque chose ?
Privé de nos clients habituels pour cause de confinement. C’est peut-être l’occasion pour les bretons de redécouvrir le chouchenn ? mais attention : Vous pourriez être agréablement surpris ! 😉
Pour en savoir plus :
CHOUCHENN D’ARMOR
15, rue Marcel Sanguy
22110, ROSTRENEN
Contactez Jean-Marie GOUEDARD !
Téléphone : 02 96 29 30 16
Email : chouchenn-darmor2.0@orange.fr
Voir leur page Facebook.
Meddyglyn, ce n’est pas un mot gaélique mais brithonique(gallois).