A l’école élémentaire, nous avons tous le souvenir de nos premiers cours de biologie : l’homme est omnivore, le fourmilier insectivore et la vache herbivore.
Or, depuis les années 1930 de nouveaux aliments autre que de l’herbe ont été apportés à l’alimentation bovine : des céréales mais également des farines animales.
Est-ce pour varier leurs menus ? Développer leurs facultés gustatives ?
Essayons d’y répondre de façon assez simple.
A l’origine de tout : la digestion.
Contrairement à l’être humain, les vaches possèdent pas moins de 4 estomacs.
Les trois premiers appelés panse, réseau & feuillet agissent comme des pré-estomacs, la digestion à proprement parler à lieu dans le 4ème organe, la caillette.
Comment cela fonctionne-t-il ?
C’est très simple.
- La vache broute paisiblement de l’herbe dans le champ, l’herbe ingurgitée n’est pas mâchée, elle entre directement dans la panse.
- La panse pleine, le bovin va pouvoir s’allonger ou se protéger auprès des talus en cas de mauvais temps.
- A ce moment va débuter la rumination : l’herbe va faire des aller-retour entre la panse et la gueule de l’animal afin d’être mastiquée et enduite de salive.
- L’activité microbienne dans la panse va créer une fermentation, qui rendra ensuite possible la digestion dans la caillette (via le feuillet et le réseau qui vont agir comme des filtres).
- Les bactéries présentes dans la panse (qui se nourrissent également de l’herbe) vont pouvoir produire des protéines. Les bovins arrivent donc a créer des protéines indispensable à leur développement grâce leur système digestif, sans en manger !
- Par la suite la caillette va digérer les lipides, glucides et protéines crées, de la même façon qu’un estomac humain.
- Une fois digéré, cet aliment complet qu’est l’herbe sera source d’énergie pour l’animal et servira à produire du lait dès la naissance du veau.
Produire plus : le leitmotiv’ de la fin du XXème siècle.
En préambule d’une étude de L’INRA parue en 1950, on peut lire « l’éleveur et l’industriel ne devraient jamais oublier que ce qui compte avant tout c’est le rendement ».
Ceci étant dit, une grande partie des acteurs du milieu agricole ont considéré les vaches comme un process industriel permettant de produire du lait à partir de matières premières.
Partant de ce postulat, à peu près tout a été essayé.
Il fallait que les vaches produisent plus de lait, et encore plus de lait.
Au delà de la sélection de races plus productives, on a apporté de nouveaux aliments plus riches aux bovins : plus de protéines et plus de glucides.
Les expériences se sont multipliées jusque dans les années 70 avec l’introduction de farines animales dans leur alimentation.
Inutile de rappeler ici les conséquences, avec les crises sanitaires telles que la « vache folle ».
Après tous ces essais, une grande partie des éleveurs laitiers nourrissent actuellement leurs bovins avec du maïs ensilé, du soja et de l’herbe sous différentes formes : fraîche, séchée (foin), ensilée, enrubannée.
Qu’est ce que l’ensilage de maïs ?
Il s’agit tout simplement de plants entiers de maïs récoltés verts (avant leur maturité), broyés, tassés puis hermétiquement couverts pour qu’ait lieu une fermentation.
Au bout de quelques mois, le maïs fermenté pourra être servi aux bovins.
Cet aliment riche en glucides sera bien plus nourrissant que l’herbe. Et comme il a déjà fermenté, il sera plus facilement assimilé par l’animal.
Cependant le maïs n’apporte pas de protéines, et la ration des vaches se retrouve déséquilibrée.
Du coup, quel est le végétal le plus riche en protéines et le moins cher sur le marché ?
Le soja pardi !
On a donc incité les éleveurs à importer des tourteaux de soja d’Amérique du Sud (le plus souvent OGM) pour parfaire la ration des vaches laitières.
Ce n’est pas pour rien que le port de Brest possède un terminal dédié aux marchandises agricole en vrac.
En 2016 l’importation de soja a représenté plus de 768 000 tonnes, contre 619 000 tonnes en 2015 !
Quelles sont les limites de ce système ?
Aujourd’hui, nombre d’agriculteurs deviennent dépendant des semenciers, et des industriels du secteur agro-alimentaire.
Les laiteries achètent le lait aux éleveurs à un prix toujours plus bas.
Contrairement à l’herbe, qui est une plante vivace et qui pousse naturellement, le maïs doit être planté annuellement, les éleveurs doivent donc acheter de la semence.
Pour pousser, le maïs a besoin d’un champ exempt de mauvaises herbes, rendant l’utilisation des pesticides nécessaire.
Ces produits phytosanitaires ont également un coût.
Ajoutons à ces dépenses les frais vétérinaires liés aux maladies que les vaches développent suite a cette alimentation boostée, les tourteaux de soja importés et autres compléments alimentaires : l’agriculteur se retrouve vite pris au piège.
Plusieurs études sur ce sujet ont été réalisées.
Citons par exemple l’étude de L’INA de Paris Grignon en 2005.
Dans le Pays de Caux, les chercheurs mettent en parallèle une exploitation de vaches nourries à l’herbe et une exploitation conventionnelle (maïs/soja/herbe) afin de comparer leur rentabilité.
La conclusion de cette étude est sans appel : « Un agriculteur gagnerait 10 000 Euros de plus par an en oubliant maïs et soja pour se mettre à l’herbe. Tout simplement, les économies réalisées en moindre consommation de maïs et de soja (chèrement importé du brésil) compensent largement les pertes en moindre production de lait. »
Existe-t-il un autre modèle ? Une autre solution ?
Actuellement, certains agriculteurs essaient de diminuer la part de maïs et soja (remplacés par exemple par des tourteaux de graines de tournesols) dans la ration alimentaire des bovins.
Une petite partie d’entre eux est même revenue à une ration exclusive composée d’herbe.
Ce sont donc les politiques agricoles appliquées en France et en Europe qui détermineront l’alimentation de bovins laitiers, et permettront peut être à ce que les vaches « redeviennent » herbivores !
Et précisons à ce sujet que l’Europe via les aides de la PAC (politique agricole commune) subventionne plus la culture de maïs que l’herbe…
Sources :
- Rapport de l’institut national agronomique de Paris Grignon (2005)
- Etude de L’INRA en 1936 par H. L. Bérard, J.M. Rosell, Jules Turgeon. L’INFLUENCE DE L’ALIMENTATION DES VACHES LAITIÈRES SUR LA PRODUCTION DE LAIT DE BONNE QUALITÉ INDUSTRIELLE.
- Etude de L’INRA en 1950 par R. Ferrando. ASPECTS DE L’ALIMENTATION DE LA VACHE LAITIÈRE.
- Institut de l’élevage en 2016 par J.Legarto, EVALUATION ZOOTECHNIQUE SUR VACHES LAITIERES DE TOURTEAUX DE TOURNESOL AVEC UN DECORTICAGE POUSSE (TTHP)
Bonjour,
je ne sais pas si cet espace est fait pour poser des questions, mais je tente tout de même.
Tout d’abord, Merci pour ce documentaire fort intéressant.
J’ai adopté 2 bœufs. ce sont des animaux domestiques et non destinés à l’élevage. Et je cherche donc des informations afin de les nourrir de façon la plus naturelle possible. je dispose d’1,5 hectare (en 3 champs). Ils viennent d’arriver sur les terres, et donc malgré la saison, l’herbe est haute . J’habite dans les monts d’Arrée en Bretagne.
Pour l’instant, ils pâturent l herbe + un peu de foin chaque jour ( 1 brouette agricole pour 2) + 500 g / bovin de céréales enrichi en minéraux + seau à lécher vitamines et minéraux.
Je me demande s’il serait possible de supprimer complètement les céréales ? Le foin est il indispensable quand l’herbe est abondante ?
merci d’avance à ceux qui pourront m’apporter leurs avis 🙂
Christelle
Bonjour Christelle,
Désolé… je ne saurai te répondre. Idéalement, le mieux est de se rapprocher d’un éleveur. Il saura très probablement te conseiller. 🙂
Bonne journée & à bientôt !
Steven
Pouvez vous m’informer sur le méthane produit par le bovin
je voudrai connaitre les effets d’une autre alimentation sur la production de méthane par rapport à une alimentation exclusivement d’herbe
j’avais entendu dire que l’alimentation en herbe permettait de réduire la « production » de méthane par les bovins
Etude sur les Gaz à Effet de Serre (GES)
Merci pour votre retour